Tous les métiers sont en tension

Rédigé le 22/09/2023
par Patrice Bouillot

Le président de la Chambre régionale de commerce et d’industrie, élu depuis décembre 2021, affiche ses priorités : l’emploi et la formation, les transitions environnementale et numérique, l’international. Dans un contexte de crises économiques successives sans précédent, et d’une région qui voit sa démographie décliner. Entretien sans langue de bois.

Décideur. Vous êtes le président de la Chambre de commerce et d’industrie de Bourgogne-Franche-Comté (CCI BFC) depuis décembre 2021. Un an et demi plus tard, quel bilan dressez-vous ?

Thierry Buatois. Beaucoup de travail avait déjà été fait avant mon arrivée, permettant la structuration de la nouvelle CCI BFC. La mutualisation des services supports, en particulier, avait été menée. Nous poursuivons la construction de la nouvelle organisation consulaire en nous appuyant sur plusieurs documents cadres, comme une convention d’objectifs et de moyens signée avec le préfet (elle fixe les grandes missions financées par la taxe pour frais de chambre), les schémas sectoriels régionaux ou encore le travail des commissions régionales, une convention avec la Région ou le SRDEII [ndlr : schéma régional de développement économique, d’internationalisation et d’innovation]. Nous avons également signé une convention avec la Chambre de métiers et de l’artisanat BFC pour mutualiser des ressources et mener des actions communes, comme par exemple sur la transmission d’entreprises.

« La Bourgogne-Franche-Comté a des atouts, mais elle doit absolument trouver les moyens de garder ses jeunes » – Thierry Buatois, président de la CCI Bourgogne-Franche-Comté

Pourquoi cette boulimie de partenariats ?

Parce que nous travaillons en réseau avec notre écosystème et que l’enjeu de la qualité du service est important pour les chambres consulaires, qui doivent se préserver des marges de manœuvre dans un contexte de diminution de la taxe qu’elles perçoivent. La mutualisation permet une réduction de nos coûts. Les services que nous proposons aux entreprises ou aux collectivités, en nous appuyant sur les six CCI territoriales, doivent désormais être partiellement facturés. Nos prestations sont variées : nous organisons par exemple des missions de prospection à l’international, nous proposons aux entreprises de participer sur un espace commun à des salons internationaux – nous sommes la seule CCI de France à le faire –, nous les accompagnons dans leurs démarches d’innovation ou de transition numérique et, en matière d’environnement, nous déployons le programme Perf pour les aider à réduire leur impact et leurs consommations énergétiques.

Quelles sont vos priorités pour la suite de votre mandat ?

Nous serons, jusqu’en 2026, dans la continuité de ce que nous avons entrepris. Le regroupement BFC étant désormais accompli, nous allons mettre l’accent plus que jamais sur l’accompagnement des entreprises de la région face aux défis qui les attendent : crise écologique, pénuries, dicultés de recrutement… Dans le domaine environnemental par exemple, nous recrutons des experts spécialisés dans la gestion de l’eau ou du photovoltaïque pour proposer un accompagnement de haut niveau. Nous poursuivrons nos grands programmes : Kapnumerik, Perf, les missions économiques en lien avec l’Agence économique régionale, l’engagement européen à travers EEN (Enterprise Europe Network), notre programme de formation, d’information et de coaching sur l’international dans le cadre de la Team France Export…

Sur l’emploi, précisément, quels peuvent être vos leviers d’action face à la pénurie de compétences qui touche notamment l’industrie ou l’hôtellerie-restauration ?

Dans notre région, grande par la taille, faible par le poids économique mais où l’industrie pèse lourd, des secteurs sont en diculté, comme l’automobile, et tous les métiers sont en réalité en tension. Pour faire face, nous n’avons pas d’autre choix que de former, toujours plus, les jeunes et les adultes, dans nos CFA, nos écoles et nos centres de formation, mais aussi de faciliter l’orientation scolaire et professionnelle. D’où le choix qui a été le nôtre de prendre la compétence orientation, de manière à faire la promotion des métiers dès le collège, à faciliter leur découverte et leur expérimentation par les plus jeunes, à renforcer les relations école-entreprise… Tout cela dans un contexte spécifique et préoccupant : nous sommes confrontés à un problème démographique puisque nous perdons chaque année l’équivalent de deux lycées, avec moins de jeunes et des jeunes qui quittent la région, attirés notamment par l’Île-de-France ou Auvergne-Rhône-Alpes. La Bourgogne-Franche-Comté a des atouts, mais elle doit absolument trouver les moyens de garder ses jeunes. La Région a bien identifié ce problème. Nous devons tous, plus que jamais, nous en saisir à bras-le-corps