E-Day (2/7) : Ecosystème vertueux

Rédigé le 25/03/2024
par Quentin Scavardo

Association régionale du réseau Avere-France, Bourgogne-Franche-Comté Mobilité Électrique (BFCME) contribue à fédérer tous les acteurs de la filière sur le territoire. À la tête de cet écosystème vertueux, Thierry Brossier et Thomas Fraioli s’engagent pour une meilleure transmission de l’information sur les enjeux liés à la mobilité électrique. Entretien.

Décideur. Pourquoi développe-t-on la mobilité électrique ? Pourquoi est-ce si important ?

Thomas Fraioli. Le premier objectif est celui de la décarbonation de l’économie et de la société. La part des transports est très importante dans les émissions de gaz à effet de serre. La solution passe donc par une électrification des usages. Comme l’usage majoritaire reste celui de la voiture individuelle, mécaniquement, il faut électrifier ces véhicules.

« L’objectif est une réduction de 55% des émissions à l’horizon 2030. » – Thierry Brossier, co-président de BFCME

Thierry Brossier. La décarbonation est aussi l’objectif de l’Europe dans le cadre du Green Deal (Pacte vert). L’objectif est de structurer une économie durable en Europe. Le transport représente 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France et 20 % en Europe. L’objectif est une réduction de 55 % des émissions à l’horizon 2030. Le basculement vers la mobilité électrique entraîne de nombreux changements dans la société, il implique une autre manière de gérer les énergies et les flottes. Des questions se posent, dans le cadre de cette transition, notamment celle de la recharge. C’est notre rôle d’accompagner ces changements par la pédagogie.

Quelle est la part de la voiture thermique dans les émissions de gaz à effet de serre ?

T.B. Les voitures particulières représentent 53% et les véhicules utilitaires légers 15%. Tous ces véhicules sont donc responsables de près de 70% des émissions de GES dans le domaine des transports. L’électrification est un levier fort pour réduire cet impact sur l’environnement. L’Europe encourage donc fortement la voiture électrique, tout en programmant la fin de la vente des véhicules thermiques, prévue en 2035. Tous les constructeurs sont tournés vers l’électrique depuis 2019 environ et, aujourd’hui, on assiste même à une course à l’anticipation dans ce domaine.

En quoi BFCME contribue-t-elle à ce développement ? Quelles sont ses principales missions ?

T.B. Notre première mission, c’est d’abord la pédagogie auprès de tous les publics. Nous portons un programme de formation national, Advenir Formations, auprès des élus ou des professionnels de l’immobilier – ces derniers sont concernés dans la mesure où il faut répondre à l’enjeu de l’accès à la recharge en copropriété.

T.F. Nous travaillons sur trois axes : informer, rassurer et casser les idées reçues. Les conducteurs craignent de ne pas pouvoir se charger chez eux, de ne pas réussir à se brancher quand ils partent en vacances. Ils redoutent aussi le coût de l’installation d’une borne… Face à ces craintes, nous devons montrer toutes les avancées en matière de mobilité électrique. Par exemple, il faut équiper quelques 600 000 copropriétés en France. Nous avons des solutions sans reste à charge pour ces derniers. Il faut rassurer et expliquer ce sujet, complexe, régi par un grand nombre de lois et de décrets. Nos cibles sont tout à la fois les bailleurs, les syndics, les professionnels de l’immobilier, les élus, le grand public, mais aussi les étudiants.

Quels sont vos leviers d’action ?

T.F. Ils peuvent être technologiques. Sur le plan financier, il existe des aides de l’État pour l’acquisition des véhicules. Des leviers réglementaires ont été déployés, par exemple la Lom (loi d’orientation des mobilités), qui impose l’électrique dans le renouvellement des flottes d’entreprise ou de collectivité pour atteindre 70 % d’ici à 2030. De plus en plus de villes passent aussi en zone à faibles émissions (ZFE), ce qui oblige les organisations à faire évoluer leur flotte.

T.B. BFCME doit être perçue comme un écosystème réunissant des donneurs d’ordre (la région, Dijon métropole…), des concessionnaires, des écoles d’ingénieurs, le pôle véhicule du futur, des fournisseurs d’énergie… Nous ne nous intéressons pas qu’aux véhicules, mais aussi à tout leur environnement. Nous favorisons la rencontre des acteurs de l’énergie et de la mobilité électrique. Chaque année, nous intégrons de nouveaux acteurs. Nous aimerions par exemple que le monde viticole et agricole se joigne à nous.

Les poids lourds investissent-ils également la mobilité électrique ?

T.F. Jusqu’à la fin de l’année dernière, nous pensions que l’univers poids lourd allait basculer plutôt vers l’hydrogène. Sauf que les solutions ne sont pas encore complètement matures. Les grands constructeurs comme Renault Trucks ont basculé une partie de leur production en électrique. Cela nécessite de revoir le réseau, car il s’agit de grosses batteries, autorisant une autonomie de plus de 300 kilomètres ; il faut envisager d’équiper le réseau autoroutier de stations de recharge tous les 60 kilomètres. Le secteur des travaux publics a également entamé sa décarbonation depuis quelque temps. Avantage immédiat : des chantiers silencieux en milieu urbain ! Pour vous donner un exemple, Enedis sous-traite chaque année une partie de ses chantiers, et cette année, les objectifs RSE sont désormais aussi importants que les objectifs financiers.

T.B. Quant à la commande publique, elle intègre de plus en plus de critères environnementaux. Les donneurs d’ordre publics sélectionnent leurs fournisseurs et intervenants en fonction de la qualité de leurs prestations, mais aussi de leur capacité à répondre à ces critères environnementaux.

Récemment, s’est tenue une Cop (conférence des parties) régionale, marquée par la venue du ministre de la Transition écologique. Quel rôle la Bourgogne-Franche-Comté peut-elle jouer au niveau national ?

T.B. Le ministre a livré plusieurs informations. Tout d’abord, la région BFC représente 5 % de l’objectif national de réduction des émissions de CO² . L’effort doit être réalisé par l’agriculture (1600 kg/t de CO² ), le résidentiel (1235 kg/t de CO² ), l’industrie (1763 kg/t de CO² ) et le transport (2967 kg/t de CO² ). Nous voyons bien que le transport représente un énorme levier et doit fournir un effort considérable.

Le président de la République a annoncé un nouvel objectif de 400 000 points de recharge publics pour 2030. Est-ce réalisable selon vous ?

T.F. Nous sommes à 120 000 aujourd’hui. Oui, c’est réalisable, car tous les acteurs se mobilisent, à l’instar des opérateurs d’IRVE et les gestionnaires de réseaux comme Enedis, qui s’organisent pour faire face à cette montée en puissance. Nous serons au rendez-vous.

Qu’attendez-vous de cette troisième édition du e-Day ?

T.B. J’espère que ce sera une journée utile pour tous les décideurs afin qu’ils s’engagent dans la mobilité électrique.

T.F. J’attends une prise de conscience des acteurs sur l’éventail des possibilités, mais aussi un réel déploiement de l’électrique pour des usages qui n’étaient pas forcément envisagés jusqu’à présent.

« Nous travaillons sur trois axes : informer, rassurer et casser les idées reçues. » – Thomas Fraioli, co-président de BFCME